Consultation ORL acouphènes et hyperacousie en 2015 : Où en est-on ?
Publié par Dr Alain Londero dans Recherche · Vendredi 05 Jun 2015
Tags: Acouphènes, ORL, Hyperacousie
Tags: Acouphènes, ORL, Hyperacousie
Consultation ORL acouphènes et hyperacousie en 2015 : Où en est-on ?
Extraits de l’intervention du Dr Alain Londero lors des conférences
de l’après-midi de l’Assemblée Générale de France Acouphènes le 28 mars
dans l’auditorium de l’Hôtel de Ville de Paris.
Transcription de l’enregistrement par Dominique Vallée, que nous remercions.
Présentation
Je suis en charge d’une consultation acouphènes à l’Hôpital Georges
Pompidou depuis les années 2000. Nous sommes deux spécialistes ORL à
recevoir environ 30 à 50 patients par semaine. Nous cumulons une
expérience clinique certaine, avec des résultats variés. La prise en
charge est pluridisciplinaire puisque nous avons l’aide d’un psychologue
en TCC (thérapie cognitivo comportementaliste). Nous bénéficions
également d’outils de radiologie et d’un réseau de spécialistes qui nous
aident. Nous avons donc une approche assez globale des situations.
Il faut pour commencer par être clair sur un point lorsque l’on parle d’acouphènes : AUJOURD’HUI ON NE DISPOSE PAS DE TRAITEMENT CURATEUR
Lorsque je vois en consultation un patient qui a déjà vu de nombreux
spécialistes de différentes disciplines, il m’arrive de lui demander :
« Qu’est-ce que vous attendez de moi ? ». Si sa réponse est : « Je
veux que vous m’arrêtiez mon acouphène. », je lui dis, un peu
abruptement sans doute, mais avec le sourire, « au revoir ». Bien que
cela puisse arriver, c’est quelque chose que l’on ne peut promettre
individuellement à chaque patient.
Il est préférable, tant pour le patient que le médecin, de se fixer des objectifs thérapeutiques réalistes et réalisables.
Il faut donc se méfier de toutes les techniques dont on entend
immanquablement parler, et dont l’objectif serait d’arrêter de manière
statistiquement significative l’acouphène des patients. Méfiez-vous des
thérapies miracles, car à ma connaissance elles n’existent pas.
On dit
acouphène, mais en fait, il y a des acouphènes. Il y a une grande
différence entre un acouphène survenant sur perte auditive modérée et
stable, ou bien sur cophose, c’est-à-dire sur perte totale de l’audition
comme par exemple après traitement d’un neurinome de l’acoustique, ou
alors sur une surdité fluctuante comme dans le syndrome de Menière.
Il y a aussi une différence entre :
- des
acouphènes dûs à une atteinte des cellules ciliées de l’oreille interne
ou à ceux qui surviennent alors qu’il y a des lésions sur les voies
auditives centrales, donc des atteintes neurologiques, suite à des
pathologies inflammatoires par exemple,
- des
acouphènes qui surviennent alors qu’il n’y a pas de surdité constatée
et on ne trouve donc pas alors de corrélation entre acouphènes et
surdité.
Il y a aussi des acouphènes qui apparaissent à l’endormissement ou
modulés suite à des mouvements, par exemple des mouvements des yeux, des
doigts, de la tête, ou serrer les mâchoires (beaucoup d’entre vous ont
vécu ces phénomènes).
Nous avons aussi l’acouphène, avec ou sans hyperacousie, et une sorte
de rareté : l’hyperacousie isolée. Ceci pose bien des questions, encore
sans réponse certaine, sur les mécanismes physiopathologiques des
acouphènes.
Enfin il faut parler du possible lien de causalité entre acouphènes
et troubles psychopathologiques, que ce soit le stress, l’anxiété, la
dépression. Il y a plusieurs façons d’envisager cela et aucune ne rend
bien compte du lien complexe entre ces différents symptômes. Il est
certain qu’un acouphène ou une hyperacousie va déclencher un état de
stress, d’anxiété, mais il est aussi probable qu’un état préalablement
anxieux aggrave un acouphène qui survient quelle qu’en soit la raison.
Il est même possible d’envisager que ces deux phénomènes puissent
dépendre d’un mécanisme situé à un autre niveau et qui aurait une
susceptibilité à développer différents symptômes.
Par ailleurs, il y a un point qui m’intéresse beaucoup c’est que les
acouphènes n’ont pas la même saillance, c’est-à-dire qu’ils n’émergent
pas de la même façon dans la scène auditive.
Nous
sommes en permanence bombardés d’informations sensorielles et notre
cerveau sélectionne les informations les plus pertinentes. Certaines le
sont plus que d’autres, à cause de leur spécificité psychoacoustique. Si
un sifflement très aigu survenait dans cette salle, il aurait bien plus
de probabilité de faire émerger une prise de conscience de sa présence,
que le bruit régulier de la ventilation de la pièce. Ceci n’est pas
étudié en tant que processus attentionnel ou de prise de conscience
mais, pourtant, le mériterait.
Nous essayons plus pragmatiquement d’améliorer les thérapeutiques qui s’adressent à tel ou tel type d’acouphène.
En voici un bon exemple, après une intervention chirurgicale sur un
neurinome, le patient n’a souvent plus de nerf auditif et, pourtant, il
peut avoir un acouphène. Il est nécessaire de le prendre en charge :
alors qu’une aide auditive n’a aucun sens, puisqu’il n’a plus de quoi
entendre, ni un médicament qu’on lui injecterait puisqu’il n’a plus de
cellules ciliées. Il va pourtant falloir s’occuper de lui.
Aujourd’hui où en est-on ?
1 Données épidémiologiques
Nous manquions jusqu’à maintenant de données épidémiologiques, les
pays anglo-saxons et nordiques étant les plus avancés sur cette
question. Les associations de patients ont fait un vrai travail pour
mettre ce besoin en avant, entre autres, pour faire admettre par les
autorités de santé qu’il s’agit d’un réel handicap. Cela permet de mieux
discriminer les populations de patients concernées par les acouphènes.
Combien de personnes ont des acouphènes suite à une presbyacousie ?
Combien de personnes jeunes ont des acouphènes suite à un traumatisme
sonore ? Il s’agit de mécanismes physiopathologiques différents et aussi
de modes de prise en charge différents.
Une meilleure connaissance du problème va entraîner de meilleures
mesures de prévention. En particulier, les normes d’exposition au bruit
dans le domaine professionnel ou de loisirs qui se sont développées au
niveau européen depuis moins d’une dizaine d’années. Elles ont du mal à
être appliquées au quotidien. Cela incite à se soucier de ne pas exposer
les salariés des entreprises à des bruits qui abîmeraient leurs
oreilles dans le cadre de leur travail. Mais aussi de prendre en compte
de plus en plus le problème cognitif qu’entraîne l’exposition au bruit
(capacité d’attention, de mémorisation). Or les open space (espaces de
travail ouverts) qui sont à la mode vont exactement dans la direction
inverse. Cela pose de gros problèmes aux patients acouphéniques : ils
entendent mal, se fatiguent plus que les autres et le bruit de l’open
space majore souvent l’acouphène. Si le patient est aussi
hyperacousique, cela complique encore plus la situation.
La connaissance et la reconnaissance de ces problèmes se développent, sous la pression des associations de patients.
2 - Modèles physiopathologiques
Les médecins disent que l’acouphène est un symptôme mais il faut comprendre en quoi c’est un symptôme et donc avoir un modèle physiopathologique qui explique pourquoi chez
certains sujets qui ont une perte auditive, un acouphène va émerger
alors que chez d’autres, qui ont semble-t-il la même perte auditive,
l’acouphène ne va pas apparaître. C’est un vrai problème. Où est-ce que
cela se passe, dans l’oreille ? Est-ce que l’oreille dysfonctionne ?
Est-ce que son fonctionnement diffère entre deux sujets ? Est-ce que
c’est la réponse cérébrale à la perte auditive qui est différente ?
Pourquoi chez l’un, l’acouphène va émerger comme perception consciente
et pas chez l’autre ? Pourquoi chez l’un, cette perception consciente va
être assez vite négligée ? (« Finalement ça ne me gêne pas tant que
cela, ça peut rester comme ça... ») et pourquoi, chez l’autre, elle va
être ressentie comme une gêne extrêmement importante ?
En fait, cela dépend des modèles d‘émergence de la perception. Il est
important de comprendre comment un patient qui n’a plus d’oreille et
plus de nerf auditif peut percevoir un acouphène de
cette oreille. Des modèles expliquent cela et ils se perfectionnent de
plus en plus. La saillance que j’évoquais tout à l’heure est l’objet de
modèles attentionnels : pourquoi parmi des milliards de sons qui nous
bombardent, le cerveau va-t-il choisir l’acouphène toujours en premier ?
C’est le cerveau du patient qui décide. Est-ce un mécanisme automatique
? Est-ce appris ? Est-ce un mécanisme qui dépend de l’acouphène ou un
mécanisme qui dépend de la personne ? Ces facteurs-là sont de mieux en
mieux compris.Vaut-il mieux agir sur l’acouphène pour calmer l’anxiété
ou l’inverse ? On affine de plus en plus la compréhension de ces
phénomènes.
On dira un mot de l’hyperacousie associée dans 40% à des cas à
l’acouphène. À un moment ou un autre, un patient sur deux acouphénique
aura une hyperacousie. Cela peut durer quelques jours, quelques semaines
; cela peut apparaître de façon décalée par rapport à l’acouphène.
C’est certainement en relation, mais cela ne correspond sans doute pas
au même mécanisme.
Il y a un modèle qui a les faveurs des spécialistes actuellement,
c’est le modèle du gain central, que l’on peut expliquer par une
analogie approximative : notre cerveau a tendance à comprimer
l’information sensorielle qui lui arrive. Il a un gain négatif,
c’est-à-dire qu’il lui arrive beaucoup d’informations et très peu sont
traitées. Ce gain est adaptable, il n’est pas toujours au même niveau.
Exemple analogique : je me mets dans une pièce sombre pendant 3h ; le
gain augmente, mon cerveau ouvre les vannes. D’un seul coup, quelqu’un
ouvre les volets. Je perçois une lumière insupportable, non que la
lumière soit agressive ou que mon œil soit anormal, mais parce que la
lumière rentre dans un cerveau complètement ouvert.
Le cerveau auditif d’une personne hyperacousique aurait tendance à
traiter l’environnement sonore comme le cerveau visuel dans mon exemple
précédent. Ceci peut avoir des implications théoriques et pratiques sur
le mode de prise en charge des patients.
Concernant l’utilité des modèles, on doit pouvoir disposer de modèles
animaux : des rats, des singes etc, qui ont des acouphènes et à qui on
peut appliquer des stratégies thérapeutiques que l’on testera avant de
les appliquer aux patients humains. On dispose maintenant de modèles
animaux de plus en plus valides pour tester les modèles théoriques et
les hypothèses thérapeutiques, comme injecter une substance dans
l’oreille d’un rat ou stimuler le cerveau d’un singe pour savoir s’ils
ont plus ou moins d’acouphènes après.
3 - Profil génétique
Un autre point sur lequel on progresse, c’est le contexte auditif de
l’acouphène et l’acouphène lui-même, on a l’impression qu’il y a
certains facteurs génétiques qui jouent, en particulier sur la
susceptibilité à avoir un vieillissement de l’oreille, appelée
presbyacousie.
Nous ne sommes pas tous égaux
de ce point de vue là. » J’ai plutôt tendance à avoir l’audition
qu’avait mon père ou ma mère qui elle-même avait tendance à avoir
l’audition d’un de ses parents … «
Autrement dit, la susceptibilité à avoir une perte auditive se
transmet ; « Il y a bien sûr tout mon environnement, si je suis ou non
exposé fréquemment au bruit, mon oreille souffre... ».
Mais, si je cumule la susceptibilité génétique et les facteurs
ambiants d’exposition sonore, mon oreille va souffrir davantage et
j’aurai un plus grand risque d’avoir un acouphène. On détermine plus
d’une centaine de gènes impliqués dans les mécanismes auditifs.
On commence des essais de thérapie génique, dont les résultats sont
attendus vers 2017, sur des patients qui ont une surdité sévère suite à
une toxicité médicamenteuse. Ceci s’adresse plutôt à l’audition qu’à
l’acouphène, mais cela donne à penser que, dans les années à venir, il
soit possible de cibler de façon spécifique, par une thérapie génique
dédiée, des déficits que l’on aura identifiés sur certains gènes.
4 - Évaluation des voies auditives
Encore un autre point sur lequel des progrès sont réalisés :
l’imagerie permet une meilleure connaissance morphologique et
fonctionnelle de l’oreille, mais aussi des voies auditives.
C’est un concept très artificiel de séparer les capteurs
périphériques qu’est l’organe sensoriel du traitement cérébral du signal
auditif. Pour entendre, il faut une oreille fonctionnelle et un cerveau
qui fonctionne. Donc s’interroger sur ce qui dysfonctionne dans le
système auditif oblige à s’interroger sur ce qui est morphologiquement
ou fonctionnellement anormal dans l’oreille interne ou dans le système
auditif cérébral. Nous avons maintenant des techniques d’enregistrement
: des ASSR 1
, des otoémissions, les Potentiels Évoqués Auditifs, etc. Les outils
radiologiques permettent de voir en 3 dimensions, pas encore les
cellules auditives, mais presque. Des IRM deforte puissance sont
capables de visualiser par exemple l’hydrops 2
, la surpression dans l’oreille interne source des symptômes de la
maladie de Menière.L’imagerie fonctionnelle cérébrale va être la grande
révolution à venir.
En effet, on commence à visualiser la structure cérébrale, et
comparer des volumes de zones cérébrales chez des sujets qui présentent
tel ou tel symptôme ; mais aussi à comprendre comment les zones
cérébrales sont connectées entre elles ; comment les neurotransmetteurs,
ces petites molécules qui transmettent l’information entre cellules,
(la sérotonine, la dopamine, la noradrénaline...) sont diffusés de
façons différentes dans le cerveau de patients souffrants de symptômes
tels que l’acouphène ou l’hyperacousie par rapport à une population
normale. Bien sûr, rien n’est miraculeux, mais les techniques font des
progrès permanents.
1 ASSR : auditory steady state response (réponse de l’état d’équilibre auditif)
2 Hydrops : est un terme médical qui désigne un œdème qui peut être généralisé (© Wikipédia).
5 - Médicaments
Le rêve de tout praticien serait de pouvoir donner à un patient
souffrant d’acouphène, trois pilules machin, non dangereuses, à prendre
pendant une semaine et ce serait fini ! Je rêve bien sûr ! Car il est
peu probable qu’une seule molécule agisse de la même manière sur tout le
monde.
Et comme l’acouphène est un mélange d’un peu d’oreille, d’un peu de cerveau, d’un peu d’hyperacousie, d’un peu d’anxiété …
il est douteux qu’il n’y ait qu’une seule solution. Cela ne veut pas dire que l’on ne cherche pas.
En ce moment, ce qui est à la mode, c’est l’injection des molécules
dans l’oreille interne. Vous avez eu certainement connaissance des
molécules AM-101 et AM-111. Globalement, ce sont des molécules qui
agissent sur les neurotransmetteurs de l’oreille interne ou les cellules
sensorielles car, quand il y a un traumatisme, soit la cellule se
répare, soit elle se suicide, ce qu’on appelle l’apoptose. Or, il y a
des médicaments qui empêchent ou ralentissent l’apoptose et donc, en
simplifiant fortement les choses, qui permettent au cerveau de continuer
de recevoir une information auditive normale et donc de ne pas produire
d’acouphènes.
Il y a aussi des médicaments anti NMDA 3
. Le NMDA est un récepteur du neurotransmetteur chargé de transmettre
l’information auditive. Ce neurotransmetteur est le glutamate. Quand
elle entend un son, la cellule ciliée produit une gouttelette de
glutamate qui va aller stimuler la fibre nerveuse qui normalement
possède des récepteurs AMPA 3
. Quand il y a un traumatisme sonore, l’excès de glutamate produit va
abîmer ces récepteurs AMPA. Ils sont alors remplacés par des récepteurs
NMDA. On suppose que cela est à l’origine d’un dysfonctionnement, source
hypothétique d’acouphènes. L’idée est de bloquer la production de ces
récepteurs NMDA et donc d’empêcher le dysfonctionnement.
Ces protocoles ne concernent que les acouphènes récents datant de
moins d’un an. Mais il faut accepter de se faire injecter un médicament
dans l’oreille interne, de se faire suivre, de prendre le risque
d’échec. Ces essais méritent néanmoins d’être suivis de près.
Il manque clairement aujourd’hui, aussi bien dans ce que l’on sait
faire que dans ce qui est dans les tuyaux de l’industrie pharmaceutique,
des médicaments qui cibleraient le symptôme lui-même (l’acouphène) et
qui permettraient de supprimer l’acouphène ou d’atténuer fortement sa
perception.
3 NMDA et AMPA : récepteur activé par le glutamate
6 - Des aides auditives plus efficaces
Autre
point de progrès : les aides auditives et les implants. Il y a une
telle corrélation entre perte auditive et acouphènes que si on compense
une perte auditive cela peut diminuer la perception de l’acouphène.
C’est le constat d’une expérience clinique quotidienne, même s’il
faut lutter contre les a priori du port d’une prothèse ou d’un implant.
Le matériel est devenu plus petit, plus performant, plus confortable,
plus communiquant : l’appareil peut être couplé avec un iPhone 4 , il
est possible d’avoir une audition stéréophonique, de cibler la personne
que l’on souhaite entendre en éliminant le bruit de fond environnant,
etc. La vie est plus facile et, souvent, avec un effet masquant
l’acouphène. Cela n’enlève pas le problème mais quand on porte son
appareil, si possible le plus longtemps dans la journée, pendant ce
temps-là l’acouphène laisse tranquille (je vois certaines personnes qui
hochent la tête).
Cela n’est pas vrai pour tout le monde, mais globalement, si le
patient est bien suivi et reçoit un accompagnement correct, on le voit
revenir avec le sourire et disant : « D’accord j’entends mieux mais
surtout, depuis que j’ai mes appareils, franchement ça va mieux pour mes
acouphènes ! »
Cela tient au fait que les appareils peuvent amplifier sur des gammes
de fréquences beaucoup plus larges, de manière plus naturelle. Ce n’est
pas encore l’idéal, mais il y a des progrès permanents. Dans un an ou
deux, un nouveau concept de prothèses auditives très novateur sera
capable d’amplifier jusqu’à 10 ou 12000 Hz et donnera un son encore plus
clair, plus naturel. Ce qui permettra aussi une possibilité de masquage
très supérieure pour les patients qui ont des acouphènes suraigus, ce
qui ne peut se faire à l’heure actuelle.
Même remarque sur les implants cochléaires : quand je converse avec
un implanté je ne peux m’empêcher d’être admiratif pour les inventeurs !
Si demain j’étais aveugle, j’adorerais que l’on me mette une caméra
dans l’œil pour que je puisse aller au cinéma. Quand on implante
quelqu’un, cela lui permet d’avoir une vraie relation sociale et, en
plus, cela peut lui soulager ses acouphènes.
4 IPhone® : smartphone Apple
7 - Psychothérapies adaptées
Un mot des psychothérapies, sujet très problématique car il est
difficile de parler psychothérapie en matière d’acouphènes, parce que
c’est un discours compliqué à tenir au patient. Je suis convaincu que
l’acouphène n’est pas un problème purement psychologique. Les patients
n’ont pas d’acouphènes parce qu’ils sont anxieux, ce n’est pas aussi
simple. Mais je sais aussi que les psychothérapies rendent service à mes
patients. Cela les aide à tolérer une situation qui, sinon, est
insupportable à gérer.
C’est certainement la technique qui permet la meilleure prise en
charge. Il y a beaucoup d’études très sérieuses, publiées. Mais on
manque de ressources en France, il n’y a pas beaucoup de psychologues
formés à ce type de thérapies dédiées à l’acouphène. Autour de cela, se
sont greffées plein de choses dont on ne connaît pas véritablement la
validation : l’hypnose, l’acupuncture, la sophrologie etc. Et c’est
toujours difficile pour le médecin que je suis de proposer quelque chose
qui n’est pas remboursé, un peu coûteux, cela mérite discussion. Mais
un patient ne perd jamais grand-chose quand il apprend et utilise à bon
escient une de ces différentes méthodes de relaxation.
8 - Critères d’évaluation
On travaille aussi sur l’évaluation, car quand on veut faire de
l’expérimentation de traitement de l’acouphène, il y a deux attitudes.
Attitude minimaliste : je demande à un patient avant traitement quelle
est sa gêne et après traitement, comment a évolué sa gêne. Il me dit «
Oui, un peu, non, peut être... », c’est une première méthode
d’évaluation, mais elle est très subjective. La réponse est celle du
moment, on n’a pas de quantification précise or les scientifiques aiment
bien mettre des chiffres sur des états. Cela permet de mieux savoir, de
mieux corréler les facteurs du traitement.
Or, on a maintenant des questionnaires dits validés qui concernent
des aspects très spécifiques : le handicap lié à l’acouphène, la
sévérité de l’acouphène, la détresse subie à cause de l’acouphène, ce
qui permet une analyse plus fine de la situation.
Car, actuellement, malgré les outils techniques que sont l’IRM, le
PET Scan etc., aucune méthode objective ne permet de corréler ce que
nous dit le patient de son acouphène avec une mesure indépendante.
Concrètement, dans l’idéal, un patient qui vient me voir pour me dire «
Je souffre terriblement de mon acouphène. », je devrais pouvoir, en
mesurant son activité cérébrale, mesurer quelque chose qui s’écarte de
la moyenne de la population. Je vais appliquer une intervention :
médicament, traitement magnétique transcrânien, etc. (quel que soit le
traitement). Il revient me voir et me dit que « Cela va mieux. ». Et je
vais mesurer la même chose : l’hypo ou l’hyperactivité antérieure
anormale doit s’être rapprochée de ce que l’on trouve chez la moyenne
des sujets.
9 - Un rapport consensuel
Pour l’instant nous n’avons pas cette possibilité donc on s’en tient à
deux méthodes : soit l’évaluation psycho-acoustique de l’acouphène
(mesure de sa fréquence, de l’intensité, du niveau de masquage...), soit
des questionnaires d’évaluation de la gêne induite par l’acouphène et
cela on le fait de mieux en mieux.
Un autre avantage de cette évaluation, est de pouvoir faire un
reporting plus consensuel. Si je veux comparer ce que je fais avec ce
que font des collègues dans d’autres pays, nous avons besoin des mêmes
outils d’évaluation ; faute de quoi, on ne pourra jamais confronter nos
résultats, on ne saura jamais quelle est la meilleure intervention et on
ne pourra jamais bénéficier de l’expérience des autres. Il y a de plus
en plus de programmes internationaux qui exigent des méthodes
d’évaluation consensuelles pour pouvoir mieux comprendre la convergence
des résultats et l’efficacité des thérapies mises en pratique.
- Mieux comprendre l’hétérogénéité de l’acouphène et développer de nouveaux traitements
Il existe une étude incluant 30 pays d’Europe, de manière à décider
de stratégies communes. Il y a des réunions 2 fois par an avec des
sous-groupes par problème. Ceci accroît l’efficacité et permet à tous
les patients européens de bénéficier des mêmes avancées.
Si j’étais le
patient concerné, cela me rassurerait de savoir que la communauté
scientifique reconnaît l’acouphène comme un problème et essaie de se
mobiliser pour tenter de trouver des solutions. Il y a peu de projets
qui mobilisent autant de participants. Voilà brossé le tableau de là où
nous en sommes en début 2015. Pour ce qui est de l’avenir, je ne vais
pas me lancer dans l’ORLmancie, l’art des prédictions hasardeuses.
Conclusion
Vous avez des raisons d’espérer. Il n’y a pas d’événement miraculeux
mais les choses progressent doucement, il y a de plus en plus de
recherche appliquée, on comprend de mieux en mieux ce qui se passe, donc
cela laisse espérer que les progrès techniques constants pourront de
plus en plus vous rendre service.
Questions et réponses
Vous avez expliqué qu’il était très
difficile de voir un acouphène, comment pouvez-vous étudier les
acouphènes sur les rats ou les singes ? Ils vous disent qu’ils ont un
acouphène ?
Ils ne nous le disent pas parce qu’ils ne savent pas parler quoique
le singe un peu... Le grand modèle de l’acou- phène aujourd’hui c’est de
dire qu’il y a un lien entre perte auditive et acouphènes. L’acouphène
serait une sorte d’image en miroir de ce qu’est la perte auditive. Ce
n’est pas aussi simple, mais cela rend compte de bon nombre de
situations. Cela veut dire qu’on peut avoir une perception parce que
quelque chose n’arrive pas, et que quelque chose manque.
J’explique souvent à mes patients que ça (le Dr Londero montre son
doigt où il y a une bague, il la retire), je perçois deux choses : la
bague à l’endroit où elle n’était pas et je perçois le manque de la
bague à l’endroit où elle était. Les deux perceptions sont aussi fortes
l’une que l’autre. L’acouphène c’est ça et ce n’est pas ça. Je n’invente
pas ce que je ne perçois pas : la bague qui me manque. Elle manque
vraiment et ma perception existe vraiment. Sauf qu’elle ne dépend pas
d’une stimulation, elle dépend d’une absence de stimulation. C’est le
grand modèle actuel de l’acouphène.
On peut apprendre à un rat à monter sur un plot quand il entend un
son. Vous lui envoyez en même temps un son et une décharge électrique,
le rat va monter sur le plot. Vous recommencez plusieurs fois avec un
son mais sans décharge. Il monte quand même car il est malin, et il se
méfie. Ensuite vous lui injectez de l’aspirine à très forte dose dans
l’oreille, ce qui est très toxique pour l’oreille. Et, alors qu’il n’y a
pas de bruit à l’extérieur, le rat grimpe quand même sur le plot.
Quelle conclusion en tirez-vous ? Qu’il entend un acouphène ?
Il y a beaucoup d’autres méthodes, le start-on par exemple : on lui
envoie un son ; si le son s’arrête, on lui envoie une décharge
électrique, il s’éloigne de la source de bruit ; au bout de 3 fois,
quand le son s’arrête, il s’en va, même sans décharge électrique. On lui
injecte la substance toxique, il s’en va, donc il a entendu quelque
chose qui est l’acouphène.
On peut donc savoir qu’un rat a un acouphène sans lui demander et sans qu’il réponde.
Je voudrais savoir s’il y a des
recherches en cours sur les cellules souches ? Lors d’une visite au
Genopole d’Évry, on m’a parlé de cellules souches qui pouvaient
remplacer des cellules cardiaques, des cellules cérébrales... mais qu’il
n’y avait pas de recherche sur les cellules ciliées.
Il y a une vraie limite avec les cellules souches car il faut les
mettre dans l’oreille cela n’est pas facile. Le cœur est accessible, on
peut l’ouvrir, y accéder, y poser un patch de cellules souches qui vont
se développer en cellules cardiaques. Cela se fait même maintenant par
endos- copie, plus besoin d’ouvrir le thorax. Ce tissu va aider le cœur à
se régénérer.
Dans l’oreille c’est plus compliqué car l’oreille est une coque
osseuse fermée et si on ouvre on risque d’abîmer encore plus, donc c’est
difficile. L’autre souci est que les cellules auditives sont peu
nombreuses. Il y en a de 16 à 20 000. Chaque groupe de 4 à 8 cellules
s’occupent d’une fréquence auditive donnée. Donc il faut parvenir à
introduire correctement la cellule souche, mais en plus il faut qu’elle
se différencie dans la bonne fréquence. Sinon, il y aurait confusion
dans les fréquences perçues et le résultat serait catastrophique.
Il y a donc de vraies limitations théoriques à l’emploi de cellules
souches en matière d’audition ; en revanche, les progrès faits dans les
autres domaines profiteront à l’oreille. Cela pourrait rendre service à
ceux qui n’ont plus aucune cellule auditive et pour qui, apporter même
une petite information pourrait être utile.
Vous nous avez parlé d’un programme européen Cost, quels sont les résultats attendus ?
Le projet Cost 5 n’est
pas un projet de recherche, c’est un projet de mise en relation
d’équipe, donc il n’ y a pas de résultats à attendre pour les patients.
Il y a 5 sous- groupes qui ont chacun un ou plusieurs projets.
Un des projets est la mise en place d’une base de données à laquelle
toutes les équipes internationales vont pouvoir envoyer leurs données.
Cela augmentera la puissance de calcul et de mise en œuvre qu’on pourra
en tirer.
Il y a un autre projet génétique pour mieux comprendre la relation
entre perte auditive, acouphènes et génétique et il y a un autre
sous-groupe imagerie, imagerie fonctionnelle EEG, imagerie en PETscan,
etc.
Je suis coach du groupe 5 qui s’occupe des outils servant à valider
le fait qu’une intervention a été utile ou non, de manière globale,
c’est l’étude des résultats. Parce qu’il n’ y a pas consensus sur
l’utilité d’une prise en charge par manque d’une méthode d’évaluation
indiscutable permettant de répondre à la question : « A-t-on ou non
rendu service au patient ? ». Pour l’instant chacun fait un peu à sa
manière, donc si on obtenait une standardisation, cela nous
simplifierait la vie pour mieux comprendre nos pratiques.
5 Programme Cost : COopération européenne dans le domaine de la recherche Scientifique et Technique
J’aurais aimé savoir s’il y a un
rapport entre acouphènes et régime alimentaire, acouphènes et activités
physiques et acouphènes et décalage horaire quand on voyage ?
Je vais vous faire une réponse non scientifique. Quand on écoute les
patients, beaucoup décrivent des modulations de leurs acouphènes par la
fatigue, l’activité physique, le régime alimentaire, la pression quand
on va en montagne (montée et descente), le décalage horaire.
Plusieurs mécanismes peuvent rentrer en ligne de compte mais je ne peux pas les démêler.
Il est certain que le facteur de modulation le plus fréquent est la
fatigue : « J’ai mal dormi et mon acouphène devient plus fort. » Pour
l’alimentation, il y a deux problèmes, soit le fait de manger augmente
l’acouphène tout de suite après le repas (ce n’est pas si rare), soit le
contenu de ce que l’on mange.
Il est très à la mode de dire que le ventre est le deuxième cerveau.
Il y a quasiment autant de neurones dans notre intestin que dans notre
cerveau. On pense que certaines pathologies digestives peuvent avoir une
origine cérébrale et, inversement, qu’un état de désordre digestif
puisse avoir, par le biais de neurotransmetteurs qui échangent entre les
deux organes, des conséquences sur certains états psychologiques.
Il y a des travaux très intéressants sur l’anorexie et la boulimie
qui sont en plein développement. Donc l’influence de facteurs digestifs
sur les acouphènes ne sont pas impossibles. Cela n’est pas prouvé
scientifiquement mais intuitivement cela a du sens.
Une autre question serait : « Est-ce que ce que je pense aujourd’hui
peut avoir une influence sur mon audition demain et sur la survenue
d’acouphènes dans 10 ou 20 ans ? » Si vous pouvez vous éviter d’avoir du
diabète, de l’hypertension, du cholestérol, etc, donc de vous détruire
l’organe noble qu’est l’oreille interne par privation vasculaire, vous
vous rendez service, sachant que cela détruit aussi d’autres organes
comme la vision pour le diabète.
Donc on peut dire que l’on a la santé que l’on mange et que tout déséquilibre est très délétère.
Suite à la dernière question, est-ce qu’il peut y avoir l’influence de médicaments, par exemple vous avez parlé de l’aspirine ?
Votre question est très compliquée pour de nombreuses raisons. La
première est qu’il est absolument certain que des médicaments, des
substances chimiques ont une toxicité sur l’oreille interne.
Les plus communs sont tous les dérivés de la quinine, certains
antipaludéens, des diurétiques, certains produits de chimiothérapie en
particulier tous les dérivés des sels de platine, l’aspirine à forte
dose, certains antibiotiques. Il y a encore quelques classes comme les
amidosides utilisés en réanimation mais aussi parfois inclus dans des
aérosols pour traiter des bronchites ou sinusites. Les macrolides
(Erythromycine®...) sont à éviter aussi.
À côté des produits dont l’effet acouphène est certain, il y en a une
quantité d’autres pour lesquels il a été décrit des événements auditifs
(acouphènes, bourdonnements, vertiges, surdité...) qui surviennent dans
des cas rares moins d’un cas sur 1000). Donc si un patient acouphénique
lit une notice d’emploi d’un médicament dans laquelle est signalé ce
risque, il dit « Je ne prends pas ».
Il faut raison garder : il arrive de temps en temps un accident
d’avion mais ce n’est pas pour cela que l’on cesse de prendre l’avion.
Sous contrôle, en limitant l’emploi, en faisant une dose test, en
évaluant l’effet après une journée de prise, on peut, avec l’accord de
son médecin, prendre le médicament. C’est le cas de beaucoup d’anti-
inflammatoires non stéroïdiens (Nifluril®, Voltarène®, Feldène® etc.)
pour lesquels il y a des cas signalés. Si on en connaît un que l’on
tolère, il vaut mieux continuer à prendre celui-là plutôt que d’en
tester un autre.
Il y a aussi des substances chimiques nocives, tels les solvants
(Xylène, Toluène...) que l’on utilise en milieu industriel. On sait que
cela a un effet cumulatif avec le bruit, c’est-à-dire que si l’on est
exposé au bruit et au solvant, la conjonction des deux est très toxique.
Cela a été démontré chez l’animal, mais aussi chez l’homme en milieu de
travail dans des études épidémiologiques.
Une question prosaïque, c’est quoi ce bruit ?
Je vous fais une réponse triviale, ce n’est pas un bruit. C’est la
perception de quelque chose qui manque. Vous avez déjà entendu parler
des gens qui sont amputés et qui perçoivent leur membre manquant... la
douleur fantôme, oui... et bien là, c’est un son fantôme. Ce qui ne veut
pas dire qu’il est hallucinatoire. Les gens qui perçoivent des
acouphènes n’entendent pas des voix comme Jeanne d’Arc, ils n’ont pas de
maladie psychiatrique.
Ils perçoivent ce qui manque. Exemple : regardez le mur et j’ai le
micro dans ma main ; deux solutions, je prends le micro et je le colle
sur le mur. Ce que vous voyez c’est la forme qui sort du fond, le
contraste entre le fond uni et le contour du micro sur ce fond. Si je
prends un burin et que je creuse le mur de cette forme là, vous allez
voir aussi une forme de micro, vous le voyez en creux, et bien
l’acouphène c’est cela : perception de quelque chose qui manque.
C’est ce que j’expliquais au début avec la bague ; on peut avoir une
perception tactile de la bague que l’on a au doigt, mais on peut aussi
avoir une perception tactile de la bague que l’on n’a plus au doigt.
L’habituation c’est l’intégration tellement forte de la présence de la
bague à son doigt que l’on n’y fait plus attention.
Vous avez dû entendre parler de ce mot habituation. Ce n’est pas un
effort surhumain pour supporter l’insupportable. C’est ce que fait mon
cerveau avec ma bague. Quand je l’ai mise les premières fois, cela m’a
gêné pendant plusieurs mois, je la manipulais tout le temps, puis mon
cerveau s’est adapté. Il a considéré que cela faisait partie de moi et
il n’y a plus eu de focalisation de mon attention dessus. C’est présent,
mais c’est comme si cela n’existait plus.
Si je l’enlève maintenant, j’aurais un problème. C’est compliqué de
comprendre cela car ce n’est pas intuitif. On a tendance à se dire : «
J’entends mon oreille siffler, donc j’ai un sifflet dans l’oreille et si
je l’enlève cela ira mieux. ». En fait c’est : « L’oreille entend mal,
et mon oreille entend mal parce que mon cerveau capte ce qui manque.
Cela me donne une perception sans qu’il y ait stimulation venant de
l’extérieur. Finalement j’ai deux solutions : soit je répare l’oreille
en espérant que mon cerveau revienne à l’état antérieur, soit, si je ne
sais pas réparer l’oreille, je peux donner à mon cerveau une chance de
se recaler correctement de façon à ce qu’il considère cette absence de
signal comme son nouvel état de base. »
Schématiquement : je suis amputé, j’ai en gros une chance sur deux
d’avoir une douleur post-amputation. Donc la douleur post-amputation
n’est pas liée qu’à l’amputation. Il faut une amputation pour avoir une
douleur, mais on peut très bien avoir l’amputation sans la douleur si le
cerveau se recale correctement, si le cerveau s’habitue, ma nouvelle
main c’est la main amputée.
Ce qu’on essaie de faire avec les techniques d’habituation c’est que
le cerveau du patient se recale de cette façon-là. Ce qui est plus ou
moins facile, parce qu’il y a des gens qui résistent, qui ne veulent
pas, donc on ne peut pas les aider et puis parfois, la structure
cérébrale ne répond pas comme on l’attend. Mais cela rend souvent
service à bon nombre de patients.
Il ne faut donc pas être dogmatique, car on entend dire parfois : «
Chez moi ça n’a pas fonctionné donc c’est nul ! ». Non, cela a pu rendre
service à beaucoup de patients, on ne peut mettre de côté une technique
tout en ayant l’absolue conviction qu’il n’y a pas de panacée
universelle.
Donc je ne défends pas une technique unique, il y a une foule de
façon de faire et il faut essayer de les utiliser avec discernement, au
mieux de l’intérêt du patient.
Je voudrais savoir s’il y a une incidence entre les acouphènes et le sommeil ?
Il y en a de nombreuses, la première est que l’acouphène perturbe le
sommeil. Une des principales plaintes des patients est la difficulté
d’endormissement ou, au moment du réveil, en entendant l’acouphène, on
sait alors que la journée va être difficile.
C’est un vrai challenge que d’aider quelqu’un à s’endormir avec un
acouphène. Dans la journée, on est occupé à autre chose, le jardin, le
travail... donc la perception est souvent moins forte. Mais, si on dort
mieux, on est plus reposé donc plus détendu, donc on a moins
d’acouphènes dans la journée donc on s’endort mieux le soir et le cercle
favorable est enclenché.
Comment dormir : avec l’aide de somnifères, d’anxiolytiques,
d’antidépresseurs, ou d’enrichissement sonore ? Est-ce que l’on envoie
le patient vers un psychologue spécialisé dans la prise en charge de
l’insomnie ? Actuellement, le plus efficace est la Thérapie Cognitive et
Comportementale dédiée au sommeil. C’est mieux que les somnifères, cela
marche plus longtemps et c’est plus efficace, mais il faut que le
patient soit volontaire et fasse les exercices qu’on lui demande... Mais
c’est faisable. Une autre difficulté peut surgir, c’est le cas d’une
personne sur dix, dont l’acouphène est modulé par le sommeil. Le fait de
s’assoupir a pour conséquence, au bout de 5 minutes, l’augmentation de
l’acouphène.
TINNITUSSIMO 88 - 2e TRIMESTRE 2015
Il n'y a toujours pas de commentaire.