Menière: Comment j'ai appris à vivre avec la maladie
Comment j'ai appris à vivre avec la maladie de Menière
Par Jacques Foënkinos
Le
titre de mon article vous semble être de la provocation, n’est ce pas ?
Comment peut on vivre mieux, ou tout simplement vivre avec cette
maladie sournoise qui nous épuise, nous invalide, nous
démoralise, nous laisse quelques espoirs pendant quelques temps, puis
revient au moment où l’on ne s’y attend pas ! Je souffre moi même de
cette pathologie depuis 1998 et je peux vous donner ci-après des
conseils. Je ne suis pas médecin et il faut prendre ce qui suit comme
un témoignage, une expérience personnelle, mais si elle peut être
utile, j’en serais ravi.
Introduction
Les 3
premières années sont souvent très dures, car les crises de vertiges
sont fréquentes, et la crainte de la crise suivante déclenche la
crise. L’opération chirurgicale parfois proposée dans les cas les plus
difficiles par le corps médical est délicate : il s’agit de la
Neurectomie vestibulaire qui consiste à sectionner le nerf vestibulaire
qui véhicule des informations erronées venant du labyrinthe et
produisent ces malaises. Une réédu- cation par la kinésithérapie
vestibulaire est indispensable pour réapprendre l’équilibre par les
autres sens. Cette opération est irréversible et comporte des risques
dont il faut être avisé. J’ai eu beaucoup de témoignages
désespérés de personnes souffrant encore après l’opération pourtant
réussie, mais dont les séances de kinésithérapie vestibulaire ne
donnaient pas les résultats escomptés sur l’arrêt des vertiges.
Je vous engage
donc, si cette solution vous est proposée, de demander l’avis de
plusieurs spécialistes de la maladie de Menière afin de mettre vos
oreilles entre des mains expertes.
Aussi en ce
qui me concerne j’ai privilégié les traitements médicamenteux et la
maîtrise par le comportement. J’en ai déduit une hygiène de vie et
une philosophie pour affronter ces périodes difficiles. J’ai pris
conscience de mes limites et j’ai essayé d’adapter mon quotidien face
à ces limites, mais sans rien m’interdire. J’ai opté pour une forme de
trithérapie : traitements médicamenteux, appareillage, comportement.
Je vais essayer de partager avec vous ci-après les éléments qui me
permettent de vivre mieux.
Traitements médicamenteux
(sous le contrôle de l’ORL en fonction de ses autres pathologies)
(sous le contrôle de l’ORL en fonction de ses autres pathologies)
Il n’y a pas
de traitement miracle, mais il faut se doter d’un certain nombre
d’outils médicamenteux à utiliser en fonction de son état. Je dispose
d’une ordonnance renouvelable avec les produits principaux et je
consulte régulièrement mon ORL, et parfois en urgence lorsque je
n’arrive pas à maîtriser la crise.
Le traitement de fond qui m’est donné est constitué de Bétaserc® et Nootropyl®.
En cas de crise légère ou d’état vertigineux perma- nents j’augmente suivant les consignes de l’ORL les doses de Nootropyl® et je complète avec du Tanganil®. Une petite cure de diurétique (Diamox®) peut être nécessaire pour diminuer la pression dans l’oreille interne, cure s’accompagnant en général d’une surveil- lance du taux de potassium dans le sang et suivant le cas d’une prise de potassium.
En cas de crise légère ou d’état vertigineux perma- nents j’augmente suivant les consignes de l’ORL les doses de Nootropyl® et je complète avec du Tanganil®. Une petite cure de diurétique (Diamox®) peut être nécessaire pour diminuer la pression dans l’oreille interne, cure s’accompagnant en général d’une surveil- lance du taux de potassium dans le sang et suivant le cas d’une prise de potassium.
En cas de
grosses crises, on ne coupe pas à la cure de corticoïdes proposée par
l’ORL pendant une semaine et à des injections de Tanganil®.
De temps en temps une cure d’antiacide (genre Mopral®) et un calmant à base de plante (Euphytose®) peuvent compléter l’arsenal médicamenteux.
De temps en temps une cure d’antiacide (genre Mopral®) et un calmant à base de plante (Euphytose®) peuvent compléter l’arsenal médicamenteux.
Appareillage
Lorsque la
perte auditive dépasse les 20% il ne faut pas hésiter à se faire
appareiller. Une bonne correction permet de limiter la perception des
acouphènes, de favoriser un bon équilibre et donc de limiter les
crises de vertiges.
En cas
d’acouphènes très perturbants, si vous en avez les moyens, utilisez un
appareil avec un masqueur d’acouphènes, cela peut aider, c’est ce que
j’ai fait et je m’en félicite.
Je suis
équipé d’un appareil puissant côté amplification pour la surdité
profonde, et qui dispose d’un masqueur d’acouphènes que j’utilise très
souvent quand mes acouphènes augmentent.
Il existe sinon des applications de bruits sur smart- phone qui peuvent assurer les mêmes fonctions mais non personnalisées.
Il faut faire régler l’appareil très souvent (1 fois par trimestre, minimum 1 fois par semestre) pour tenir compte des modi cations, car en cas de crise l’audition baisse, et malgré les médicaments elle ne revient pas malheureusement au même niveau.
Il faut faire régler l’appareil très souvent (1 fois par trimestre, minimum 1 fois par semestre) pour tenir compte des modi cations, car en cas de crise l’audition baisse, et malgré les médicaments elle ne revient pas malheureusement au même niveau.
Il faut éviter de rester dans le silence absolu et éviter aussi les environnements trop bruyants.
Votre audioprothésiste pourra aussi vous conseiller pour des bouchons adaptés à votre cas, surtout si comme moi, vous allez de temps en temps dans des spectacles musicaux (Je rappelle qu’il ne faut rien s’interdire !).
Votre audioprothésiste pourra aussi vous conseiller pour des bouchons adaptés à votre cas, surtout si comme moi, vous allez de temps en temps dans des spectacles musicaux (Je rappelle qu’il ne faut rien s’interdire !).
Comportement
C’est la partie que je vais le plus développer car c’est la clé du vivre mieux avec Menière.
Gestion de la crise
Il faut essayer de ne pas craindre la crise, car la peur engendre le stress et le stress la crise.
Lorsqu’une
crise débute, essayer de garder son calme, de garder les yeux ouverts,
de xer son regard sur un point et de se concentrer dessus jusqu’à que
le cerveau reprenne le dessus sur le vertige. Cela permet de diminuer la
durée de la crise et d’éviter une plus grosse crise rotatoire, mais
dans tous les cas ne pas rester debout, s’assoir, y compris à même le
sol a n d’éviter une chute.
Il faut se concentrer sur sa respiration, respirer doucement et profondément.
Il faut aussi éviter les mouvements brusques de la tête. Il est possible avec le temps de déceler des signes précurseurs de la crise : état nauséeux, sensation de cerceau oppressant les tempes, augmentation des acouphènes, sensation d’oreille pleine.
Il faut aussi éviter les mouvements brusques de la tête. Il est possible avec le temps de déceler des signes précurseurs de la crise : état nauséeux, sensation de cerceau oppressant les tempes, augmentation des acouphènes, sensation d’oreille pleine.
Mon ORL m’a proposé une parade qui marche pour moi : verser sous la langue une ampoule de Tanganil® injectable
(c’est aussi buvable), éventuellement avec un sucre ou avec un peu de
jus, car ce n’est pas très bon. J’ai toujours avec une boite d’ampoules
de Tanganil®,
cela me rassure et me permet d’oser me déplacer. Cela m’évite de
rester cloîtré chez moi, ce qui est très mauvais pour le moral et
pour la pathologie, car il faut se confronter à l’environnement
extérieur. D’une manière générale il faut essayer de se reposer, se
relaxer, se détendre a n de résister à ces crises. L’expérience
montre que des crises surviennent ou reviennent en cas d’évènements
anxiogènes, de dif - cultés familiales ou professionnelles, de
périodes où le corps est fatigué par une autre maladie et aussi
suivantlapériodedel’année:intersaisonautomneet printemps, changements
brusques de température et de pression.
Il ne faut pas
hésiter à faire une cure de vitamine (par exemple gelée royale)
et/ou de magnésium B6 dans ces périodes a n de recharger les accus et
mieux résister.
Pour se
rassurer si une crise arrive à l’extérieur, il est bien d’avoir sur
soi un petit mot signalant son état. J’ai mis ce qui suit dans mon
portefeuille:
« Je souffre de vertiges de Menière. Merci de prévenir au numéro inscrit au verso ou de m’aider à regagner mon domicile. Il n’est pas nécessaire d’appeler un médecin »
« Je souffre de vertiges de Menière. Merci de prévenir au numéro inscrit au verso ou de m’aider à regagner mon domicile. Il n’est pas nécessaire d’appeler un médecin »
Les soins
- la rééducation vestibulaire
Ce traitement physique des vertiges et des instabilités a été reconnu par les caisses de Sécurité sociale.
Il permet, après un bilan-diagnostic par un kinésithé- rapeute spécialiste, d’agir entre autre sur les entrées sensorielles de l’équilibration que sont le système vestibulaire, les 2 vestibules et la vision. Les premières séances sont assez pénibles, mais des améliorations notables peuvent être obtenues avec une vingtaine de séances.
Il permet, après un bilan-diagnostic par un kinésithé- rapeute spécialiste, d’agir entre autre sur les entrées sensorielles de l’équilibration que sont le système vestibulaire, les 2 vestibules et la vision. Les premières séances sont assez pénibles, mais des améliorations notables peuvent être obtenues avec une vingtaine de séances.
Les personnes
souffrant de Menière ont souvent une défaillance de la transmission
des ordres du cerveau vers les muscles (cheville, mollet...) qui gèrent
l’équilibre. Des exercices faits en kinésithérapie vestibulaire
améliorent vraiment ce déficit. Je fais des séries de 30 séances, et
quand je m’arrête quelques mois, je me rends compte que mon équilibre
précaire revient.
- La marche
C’est en ne
bougeant pas, en ne sollicitant pas nos fonctions d’équilibre, que la
situation s’aggrave et déclenche une peur qui conduit à rester
prisonnier chez soi, avec les conséquences néfastes pour son moral. Il
faut se faire aider par un proche ou un ami pour essayer de marcher, de
sortir, de se confronter avec notre environnement, même si c’est
difficile au début.
- Les massages
Il ne faut pas
hésiter à se faire du bien pour lutter contre le stress et se relaxer
: les séances de kinésithérapie des vertèbres cervicales soulagent
énormément car le fait d’être toujours en déséquilibre entraîne
des tensions au niveau du cou et des épaules, de même pour les
séances de kinésithérapie des lombaires qui soulagent les tensions du
bas du dos. J’ai aussi testé la réflexo- logie plantaire qui procure
un bien-être important par une stimulation importante des terminaisons
nerveuses existant dans les pieds. Pour les séances d’ostéopathie qui
soulagent aussi, il faut quand même faire attention aux manipulations
trop brusques des vertèbres cervi- cales qui peuvent déclencher des
crises violentes.
- La sophrologie et les exercices de respiration
C’est une
méthode de relaxation bien connue des acouphéniques, qui marche aussi
pour les personnes souffrant de la maladie de Menière avec certaines
précautions dans le cas d’exercices avec des mouvements de tête. Les
exercices de respiration permettent de concentrer son cerveau sur notre
rythme respiratoire, de décontracter les muscles et de maîtriser les
vertiges.
Alimentation
Il y a
quelques conseils à respecter pour limiter les risques de vertiges : il
faut éviter les remontées d’acidité qui favorise les états
nauséeux et les vertiges. La suppression des laitages est importante,
il vaut mieux privilégier le lait sans lactose ou le soja, éviter les
crudités le soir, éviter la position allongée moins d’une heure
après le repas.
Lors d’un traitement sous corticoïde proposé par l’ORL suivre un régime sans sel et sans sucre.
D’une manière générale il ne faut pas faire d’excès ni en boisson, ni en café et surtout ne plus fumer, mais ne rien se refuser non plus.
D’une manière générale il ne faut pas faire d’excès ni en boisson, ni en café et surtout ne plus fumer, mais ne rien se refuser non plus.
N’oubliez pas non plus que l’association France Acouphènes est
là pour vous écouter, vous informer et vous aider et en tant que
référent Menière vous pouvez me contacter par mail (adresse mail
ci-dessous).
Conclusion
Mais il y a un
élément fondamental dans tout cela, même dans les pires moments il
faut garder espoir, se faire aider moralement par des proches ou des
amis, voir ne pas hésiter à consulter un psychologue. Il faut
apprendre à se connaître et essayer de prendre du recul par rapport à
son état. On n’y arrive pas toujours au début, mais cela viendra.
L’aide et l’encouragement de personnes proches est essentielle. Il faut
parler, beaucoup parler... Surtout ne pas se replier sur soi-même car
le moral tombe et les crises augmentent. Il faut essayer de sortir, se
confronter à notre environnement, éviter de rester cloîtré chez soi
par la peur, ce qui joue sur le moral, donc sur les symptômes.
Jacques Foënkinos
contact : contact.meniere@france-acouphenes.org
Ne
modifiez ou ne cessez jamais un traitement médical après la lecture
des informations contenues dans notre revue ou notre site Internet.
Adressez-vous toujours à votre médecin traitant seul habilité à
modifier votre traitement.
Avis du docteur Didier Bouccara, ORL, sur ce témoignage
"Ce témoignage est comme toujours très riche en informations sur un
parcours difficile. Les différents traitements suivis montrent qu’il
n’ya pas de règle unique pour essayer de contrôler les symptômes de
la maladie de Menière. L’évolutivité étant très différente d’une
personne à l’autre c’est finalement la prise en charge régulière par
le médecin ORL référent qui connaît bien le patient et ses
symptômes, qui va permettre d’adapter les mesures thérapeutiques en
fonction du temps. Par ailleurs il faut noter que l’évolution
spontanée de la maladie se fait dans un nombre non négligeable de cas
par un arrêt des crises vertigineuses qui initialement étaient
intenses."
NB Certains
traitements utilisés lors de la maladie de Menière le sont en dehors
du cadre de leurs indications officielles c’est à dire définies par
les autorisations de mise sur le marché. Ceci implique un choix ciblé
par le prescripteur avec la prise en compte des conséquences
éventuelles de l’instauration de ces traitements.
2 commentaires
danielle brach
Jeudi 11 Jul 2024
Merci pour ce témoignage qui va m aider à éviter quelques erreurs comme celle de me coucher après le repas et de rester couchée car c est dans cette position que je me sens le mieux après une crises pendant une semaine voire 15 jours...
Bonnet christine
Lundi 22 Jan 2024
Merci pour tous ces précieux conseils.